Hydrogène

Deux billets de blog enlèvent toute couleur à cette substance :

Wasserstoff – Heilmittel zur Sicherung der schweizerischen Energieversorgung?

ainsi que celui ci-dessous 

Les cancres ne feront pas passer l’hydrogène

par Michel de Rougemont ,   23 novembre 2023               

L’alarmisme climatique de circonstance accueille comme une nouvelle pierre philosophale toute proposition de transition énergétique, à l’instar de l’hydrogène-mania qui s’est emparée des chancelleries et corrompt les esprits d’ingénieurs ayant perdu leur probité. Il me faut ici débusquer un acte de foi qui s’avère irrationnel, voire totalement stupide et certainement scandaleux, à la lumière de ce qu’est l’hydrogène et de ce qu’il n’est pas.

Ce n’est pas une énergie primaire qu’il suffit de récolter, comme le charbon, le pétrole, le gaz, l’irradiation solaire ou l’uranium. Pour l’obtenir, il faut consommer une autre forme d’énergie, que ce soit par la combustion partielle du gaz naturel, l’électrolyse de l’eau qui consomme du courant électrique (rendement énergétique de 60-70 %), ou la thermolyse de l’eau à haute température qui reste à développer industriellement avec des réacteurs nucléaires ou des centrales solaires thermiques dédiés à cela.

Ni coloré ni primaire ni accumulable en grandes quantités, c’est un réactif chimique très utile pour produire des engrais azotés, en pétrochimie et en chimie fine. La molécule de dihydrogène est un gaz ayant une large plage d’explosivité dans l’air (de 4 % à 75 %). Pour les impressionner, les mauvais profs de chimie auront démontré cela à leurs élèves, en replissant un ballon de deux volumes d’hydrogène et d’un d’oxygène pour ensuite faire détonner ce mélange. 17 fois moins d’énergie est nécessaire pour initier cette explosion que pour allumer le gaz naturel. 

L’hydrogène, ce gaz particulièrement fugace et dangereux, ne doit jamais être mis entre les mains des consommateurs lambdas.

Sa chaleur de combustion de 120 MJ/kg (ou 33,3 kWh/kg) est des plus élevées mais ce kilogramme occupe en conditions normales plus de onze mètres cubes, ce qui n’est pas pratique. Il faut alors le comprimer à 700 bar pour occuper 24 litres ou le liquéfier à −252,87 °C pour qu’il occupe 14 litres. En comparaison, la même énergie sous forme de benzine ordinaire occupe un volume de 3,5 litres.

Mélanger du H2 avec du gaz naturel dans les réseaux de gaz existant est aussi proposé, mais c’est une escroquerie avec un pouvoir calorifique réduit par dilution, un coût augmenté et des risques de fuite plus élevés. 

Fabriquer de l’hydrogène pour stocker de l’énergie avant de la brûler dans des moteurs à combustion interne ou des piles à combustible : c’est la pire façon de l’utiliser et la meilleure façon de gaspiller les trois quarts de l’électricité consommée dans l’environnement.

Il est carrément imbécile de s’obstiner à développer une «filière hydrogène» dispendieuse et dangereuse, comme prétend le faire la Commission de l’UE.

Graphique: 
Comparaison des besoins en électricité pour des véhicules propulsés par une pile à combustible brûlant de l’hydrogène 
(efficience énergétique de 50%) ou pour des véhicules électriques avec batteries au lithium.
Plus il y a d’étapes intermédiaires et plus elles sont inefficientes, plus il y a des pertes (en orange) 
qui sont de l’ordre de 75 % dans le cas de l’hydrogène et de 12 % pour les batteries.

Du graphique ci-dessus il ressort que, pour obtenir le même service de propulsion mécanique, il faudrait disposer de 3,3 fois plus d’électricité pour une filière à hydrogène que pour les simples véhicules à batterie.

De plus, penser produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau à partir de sources de courant intermittentes est une idée de plus pour être inefficient. Les électrolyseurs ne peuvent travailler que si la source est active, ils ne seront donc utilisés en moyenne qu’à 11 % de leur capacité si la source est photovoltaïque ou à 20 % pour l’éolien en Suisse.  Cette course à l’inefficience et aux investissements démesurés et mal utilisés est de la pure folie.

L’hydrogène a bien plus de valeur s’il n’est pas brûlé. Entre autres, il existe des procédés de réduction du CO2 qui permettent d’obtenir des dérivés organiques, par exemple des carburants synthétiques (synfuels). Les taux de conversion et les rendements de ces procédés sont encore bien trop bas pour les rendre économiquement acceptables. Néanmoins, il vaut la peine de tenter de les développer à un niveau industriel, car rien n’encourageait à le faire à fond dans le passé. Une véritable prouesse technologique (breakthrough) sera nécessaire pour que, combiné avec la thermolyse de l’eau pour produire du H2 abondant et peu coûteux, des carburants synthétiques puissent devenir une solution valable pour les transports par camion et aériens. D’importants investissements en R&D sont justifiés à condition que des instituts du plus haut niveau d’excellence en soient chargés.

D’ici là, il est scandaleux de mettre la charrue avant les bœufs et de galvauder prématurément des sommes immenses pour investir dans une usine à gaz gigantesque et absurde.

Pour contredire ce qui est présenté ici, il faut des arguments, et je mets quiconque au défi de les fournir.

Pour en savoir plus, consultez le livre de Samuel Furfari « L’utopie hydrogène » , aussi en anglais.